Y-a-t-il une race au Québec?

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Madame Bochra Manaï, Commissaire à la lutte aux racismes et aux discriminations systémiques de la ville de Montréal lors d’une rencontre avec l’auteur de ces lignes, le 05 mars 2024.

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Hadj Zitouni, Porte-Parole 
Mouvement Action Justice, un organisme en défense des droits   
31 mars 2024

« La science moderne a démontré que le concept de race ne repose sur aucun fondement biologique et qu’il s’agit en fait d’une construction sociale permettant la domination d’un groupe sur un autre. »  Le racisme systémique…Parlons-en! Revue de la ligue des droits et libertés, édition juin 2022. 

« Les faits qui mènent au présent appel sont relativement simples ».                         L’honorable, Stéphane D. Tremblay, juge de la cour du Québec, Jugement en date du 01 février 2024.

D’emblée, je cède la parole à ce juge de la cour du Québec, division administrative et d’appel, l’honorable Stéphane D. Tremblay. Il va vous résumer lui-même l’histoire d’un enfant âgé de 9 ans (Wassim) qui a interjeté appel de la décision rendue le 04 mars 2022 par l’honorable Guylaine Giguère, juge administrative de la commission d’accès à l’information de Québec (Dossier 1023593-J). 

Tout d’abord, il convient de souligner que, lors de l’audience du 14 décembre 2023 (N : 500-80-042692-229), le juge Stéphane D. Tremblay de la cour du Québec a semblé afficher une certaine empathie envers cet enfant qui a saisi le tribunal en quête de rétablir un désordre de justice. L’honorable Stéphane D. Tremblay a même accepté la demande de l’appelant, celle de lui résumer le litige qui l’oppose aux services de la police de la ville de Montréal, le SPVM afin de l’assurer à tout le moins qu’il avait bel et bien pris connaissance du dossier avant même son arrivée à la cour. Toutefois, le juge Stéphane D. Tremblay s’est abstenu d’indiquer expressément qu’il ne comptait pas uniquement juger ce cas d’espèce, mais également envoyer un message clair quant à l’appartenance de tous les enfants issus de l’immigration, comme Wassim, au Québec. 

Avant de débuter son récit, le Juge Stéphane Tremblay dressa sa posture et ajusta sa chaise au centre de son bureau en esquissant un sourire, puis il rapporta fidèlement les évènements au dossier qui lui ont été présentés :

Le 10 juin 2018, Wassim, un enfant Montréalais âgé de 9 ans jouait dans la cour de l’immeuble de sa résidence appartenant à une coopérative d’habitation où plusieurs familles cohabitent. Un voisin au nom de M. Boudreau traversa la cour, accompagné de son fils, quand il remarqua un sac de chips vide au sol. Lorsqu’il demanda qui l’avait jeté, son fils désigna à tort Wassim. L’homme, ramassa alors le sac aussitôt et se lança en direction de Wassim. Il l’attrapa violemment par le cou, ouvrit la fermeture éclair de son manteau, tira le collet de son chandail pour y faire une ouverture et lui glissa rudement le sac de chips à l’intérieur. Ensuite, il le traina à l’endroit d’une poubelle à proximité et ordonna au jeune garçon de jeter le sac de chips à l’intérieur. Tout au long de cette agression, Wassim pleurait, criait en demandant à son agresseur de le lâcher et qu’il avait terriblement mal au cou. 

Une fois enfin libéré de l’emprise de M. Boudreau, Wassim rentra chez lui en courant. Sa mère fut effrayée par l’état de son enfant. Elle appela la police et en attendant leur arrivée, elle lui appliqua des compresses froides autour du cou pour atténuer la douleur. Les marques des doigts de l’agresseur bien flagrantes témoignent du degré de violence faite à l’enfant. 

L’arrivée des policiers.  

Deux policiers du SPVM, matricules 5518 et 7837 du poste de quartier 44 sont arrivés au domicile de la victime. Ils ont pu rencontrés cette dernière en présence de la mère et ont constaté l’état de choc dans lequel ils se trouvaient. Ils sont ensuite allés à la rencontre de l’agresseur et de sa conjointe puis sont retournés expliquer à la mère de la victime qu’il s’agissait d’un voisin et que la plainte risquait d’envenimer l’atmosphère du voisinage. Le matricule 5518 rapporte que la conjointe de l’agresseur était sincèrement navrée de ce qui était arrivé. 

A ce moment des faits, le père de la victime était au travail. Les policiers ont demandé à la mère d’attendre le retour du père pour déposer la plainte. Néanmoins, ils lui laissent une carte et un numéro d’évènement (44-180610-013). Le suspect n’a pas été arrêté. 

Le lendemain, le père appelle les policiers et insiste pour les rencontrer. Quatre jours après, les policiers reviennent chez lui. Cette fois le matricule 5518 était accompagné par le matricule 5830 du poste de quartier 44.  Étrangement, ils veulent le décourager à déposer plainte. Un échange passe mal entre le matricule 5518 qui se montre condescendant et désagréable. Face au refus des policiers de prendre la plainte, le père de Wassim les a interrogés sur le rôle de la police. Le matricule 5518 lève le ton et le père de Wassim préféra mettre fin aux échanges.  

Un rapport de police est rédigé et envoyé à Mme Mylène Bourdeau, sergent-détective enquêteur aux services des enquêtes de la Région-Nord de Montréal (MTLEV1800571645). Plusieurs mois se sont écoulés avant que le père n’apprenne par l’enquêtrice que le dossier avait été fermé. Mme Mylène Bourdeau, la sergente-détective s’est excusée de ne pas pouvoir aller plus loin dans l’enquête. 

Demande du rapport d’incident aux archives de la SPVM.

Le père de Wassim a donc fait une demande aux archives et à l’accès à l’information du SPVM afin d’obtenir le rapport de l’incident. Il voulait savoir ce qui avait été inscrit au dossier pour que la plainte donne lieu à une fin de non-recevoir. 

Dans le rapport, il est mentionné le type d’incident: « voies de fait, mais on ajoute (NIV 1) Niveau1. Le rapport minimise grandement l’agression. Il est noté à titre d’exemple et je cite : « une légère rougeur est perceptible au niveau du cou (au niveau du collet) ainsi qu’une légère marque à l’arrière du cou…Rougeurs observées par les policiers… prise de photo non nécessaire puisque les marques sont tellement légères que cela n’aurait pas été perceptibles. »

Aucune déclaration tenant compte de l’âge de l’enfant.

Pas de notes au calepin pour les policiers qui ont intervenus dans l’évènement.

Nous, n‘avons pas vu le sac de chips vide. »

Information complémentaire du rapport concernant la rencontre du père en date du 14 juin 2018

Je cite : « Monsieur ne veut pas de médiation et désire une plainte. Monsieur trouve que nous prenons le dossier à la légère alors que nous avons offert une solution reliée à la médiation. Il va même jusqu’à insinuer que nous avons une partie prise pour le suspect… Nous avons senti que nous étions les accusés qui devaient défendre nos points de vue. Nous avons rompu la conversation. » 

Et pour résumé leur rapport, le matricule 5518 a notéUn voisin commet un voie de fait envers un enfant dans la cour d’une coopérative. Le père désire porter plainte. 

L’interrogation de l’enfant Wassim vis-à-vis au rapport de l’incident. 

Assis sur le canapé, le père déposa le rapport et se senti complètement impuissant face à cette injustice. Encore une fois, il encaissa péniblement le coup et poussa un profond soupir quand Wassim lui demanda « papa qu’est-ce que ça veut dire maghrébin? »      

Wassim tenait le rapport dans ses mains. Son père qui venait juste de remarquer la présence de son fils sur le canapé fut frappé de mutisme… Le père pensif face à cette question s’interrogea dans le silence, pourquoi Wassim lui posait cette question? Quel enchainement y’avait-t-il avec le rapport de l’incident du SPVM ?

Et sans tarder, il se détacha de sa réflexion et il lui répondit :

_ « C’est les peuples qui habitent l’Afrique du Nord. »

Wassim n’avait jamais mis les pieds en Afrique. Il est blanc de peau et dans son imagination, tous les africains sont noirs. Il fut très surpris par cette réponse et demanda pourquoi on le rattachait à ces peuples lointains. Il montra à son père les deux premières pages du rapport, comportant des renseignements et des descriptions concernant les parties impliquées dans l’incident. Il est noté que Wassim est de race maghrébine et un peu plus loin, que la race du suspect est caviardée. Son esprit est alors assailli par une série de questions. Il s’interrogea aussi sur la race du suspect? Et d’ailleurs pourquoi, elle est censurée?  Son père lui aurait-il caché quelque chose?  

Le père de Wassim se sent dénué de toute substance. Que va-t-il désormais pouvoir dire à cet enfant qui n’a choisi ni ses origines ni son lieu de naissance? Cet enfant qui a toujours entendu son père lui dire qu’il était Québécois et qu’il devait être fier de l’être. Ce père qui voulait à tout prix épargner à son fils un suicide identitaire. Wassim a fait naître ses racines dans cette terre qui lui appartient et aujourd’hui, on cherche, au nom de l’état, à le déraciner. 

En pensant à l’agression subie par son fil, le père de Wassim est envahi par une vague de reproches et de culpabilité. Le père de Wassim bouillonnait de l’intérieur. Tout ce qu’il avait tenté de construire vient d’être détruit par un agent de l’ordre servant un système corrompu. La hiérarchie qui venait de se mettre en marche déstabilisera cet enfant pour le restant de sa vie. Le père de Wassim s’excusa et serra son fils dans ses bras. Au bout du compte, il choisit de ne pas répondre à ses questions. 

Coller une race à la peau de nos enfants afin de les réduire à un rang inférieur. 

Le père de Wassim ne tarda pas à demander à deux reprises aux archives et à Accès à l’information du SPVM de lever le voile sur la partie caviardée du rapport, celle de la race du suspect et de sa conjointe. Il voulait mettre en évidence le racisme systémique présent au Québec. Le 24 février 2020, il reçut un rejet (Réf: 20-143059). Il était noté qu’en vertu des articles 28, 31, 53 et 59 de la loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la race du suspect et de sa conjointe faisait partie de ces renseignements qui ne peuvent être communiqués. 

Le 12 mars 2020, le père de Wassim et en vertu de l’article 135 de la loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnel envoie à la Commission d’accès à l’information du Québec une demande de révision. Le 17 décembre 2021, lors d’une rencontre virtuelle, la demande a été entendue devant la juge administrative, Mme Guylaine Giguère. Le père de Wassim explique à la juge que le suspect est un voisin qu’il connait très bien depuis plusieurs années. L’information demandée ne pouvait donc en aucun cas nuire à une enquête ou quoi que ce soit. L’enquête elle-même a été classée sans suite. Il précise au même titre qu’il n’avait aucune envie de poursuivre l’agresseur devant les tribunaux. Il ajoute que l’agent de l’ordre n’a pas compétence pour définir ni la race des individus impliqués dans des évènements ni l’origine des résidents d’un état. La race n’est pas une couleur de peau ou de condition physique déterminante. Ici, dévoiler la race du suspect et de sa conjointe n’est pas susceptible de nuire ou compromettre le cours d’une enquête ou la vie d’une personne. Après réflexion, il s’agissait d’un préjudice non fondé qui pouvait être faux et mensonger. 

Madame la juge Guylaine Giguère, mal à l’aise, a laissé échapper un rire jaune, sans éclats. Elle confirma aux présents qu’il s’agissait d’une question qui incombe plutôt au rôle du politique. Me Keith Riti, avocat de la ville, division des affaires policières-affaires juridiques a fini sa course de plaidoirie quasiment apprise par cœur et peu convaincante. Il jonglait Me Keith Riti avec les articles de lois dans son spectacle. Il ressemblait à ces jongleurs qu’on croise dans les intersections des rues de Montréal en quête de pièces de monnaies. Ses témoins, deux responsables des archives du SPVM, M.Benoit Robitaille et M.Frank Lombardo attendaient avec impatience la tombée du rideau et la déconnexion de la salle virtuelle. Nous sommes dans la période de la covid 19. 

La juge Guylaine Giguère avait mis le dossier en délibéré en promettant d’aller jeter un coup d’œil sur ce qui avait été caviardé dans le rapport d’incident. 

Le 04 mars 2022, la demande de révision du père de Wassim devant la commission d’accès à l’information avait été rejetée. 

Appel devant la cour du Québec.

Le 04 avril 2022, Wassim a 14 ans, le temps passe vite. Le père se demande comment il pourrait participer à épargner à ces millions d’adolescents ce vide qui se creuse de plus en plus devant eux. Le père de Wassim avait fait appel à la cour du Québec, en s’appuyant sur le paragraphe 9 du 2e alinéa de l’article 59 de la loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Le tribunal pouvait exceptionnellement permettre à l’appelant d’avoir accès à un tel renseignement puisqu’il s’agit d’une personne directement impliquée dans l’évènement visé.

Lors de l’audience du 14 novembre 2023, le juge Stéphane D. Tremblay de la cour du Québec demande à l’appelant pourquoi ce dernier insiste pour obtenir cette information sur la race, alors qu’il pourrait interpeller des politiciens qui sont concernés par la question. L’appelant explique à la cour que la justice doit participer lorsqu’il s’agit de rétablir l’ordre au sein d’une société. Le pouvoir discrétionnaire du SPVM est discutable devant ce tribunal. Il ajoute que le fait de cataloguer des citoyens dans des cases est injuste et la cour doit contribuer à éliminer ces écarts. 

Me Ghislain Ouimet, avocat de l’intimée, du SPVM, s’est montré prudent en s’appuyant sur les articles déjà mis en exergue. Il les greffe à des jurisprudences additionnels. Il renvoie librement l’honorable juge Stéphane D. Tremblay à se référer aux articles de lois. Toutefois, l’appelant rappelle à la cour son devoir d’impartialité et de bonne foi. Les lois ne sont pas figées dans le temps, elles sont faites pour évoluer avec la société. Enfin, le père de Wassim, indique qu’il a confiance en la justice québécoise. 

Le 01 février 2024, l’honorable juge Stéphane D. Tremblay rend sa décision. Il conclut que le SVPM pouvait exercer sa prérogative pour faire prévaloir le principe de la confidentialité. Il rejette l’appel en condamnant le père de Wassim à payer les frais de « l’injustice ». 

Le père de Wassim est tombé malade. Il est resté cloué au lit, incapable de se lever pour aller au travail. Depuis, il souffre d’insomnies. Les nuits, il déchire le silence par des vagues de mots à la frontière du délire. Il complète sans cesse les arguments qui lui manquaient lors de ses nombreuses interventions depuis le début de cette affaire. Dans ces sorties nocturnes, il s’adresse directement à la juge Guylaine Giguère, en lui demandant qu’est-ce qui la fait rire lors de l’audience? Il reproche également à l’honorable Stéphane D. Tremblay son loyalisme colonial malgré la nuit des temps. Au matricule 5518 du poste de quartier 44, pour le père de Wassim, il ne pourrait être qu’un Spitz ou encore un Beauceron primitif. Il déplore son arrogance, son manque de respect, son abrutissement … La maman de Wassim se réveille. Elle se glisse de son lit en douceur et s’en va dormir au salon. En fermant la porte de la chambre d’arrière elle, le père de Wassim l’entend dire : Dieu ayez pitié de lui… 

Rencontre avec Bochra Manaï, Commissaire à la lutte aux racismes et aux discrimination systémiques de la ville de Montréal.

Le père de Wassim reprend doucement ses forces. Il demande à rencontrer, Madame Bochra Manaï, Commissaire à la lutte aux racismes et aux discriminations systémiques de la ville de Montréal. Wassim, en plus d’être québécois, est indiscutablement montréalais. Son père exerçait en tant que taxi, ses longues études menées dans un autre pays n’étant malheureusement pas reconnu au Québec. Wassim l’accompagnait dans ses trajets. Montréal, Wassim la connaissait mieux que n’importe qui, « Vous ne pouvez pas, non plus, lui enlever ça » disait le père de Wassim. Il va donc la rencontrer, Madame la Commissaire et vider ce trop-plein qu’il n’arrive plus à supporter.

Le 05 mars 2024, le père de Wassim franchit le seuil d’une annexe de l’hôtel de Ville de Montréal. Madame Diaka Cisse, adjointe de direction de la commissaire à la lutte aux racismes et aux discrimination systémiques de la ville de Montréal descend l’accueillir et le conduit dans une salle superbement éclairée où Madame Bochra Manaï l’attendait. Elle était ravissante la Commissaire à la lutte aux racismes et aux discrimination systémiques. Ses cheveux gris cendrés tombaient en cascade sur ses épaules rafraîchissaient une jeunesse qui maintient encore le cap. Le père de Wassim lui raconta son récit et implora son aide. Madame Bochra Manaï est motivée à défendre cet enfant. 

Madame Bochra Manaï indique au père de Wassim qu’elle aussi a un « Wassim » chez elle. Elle se plaignait également du racisme et le père de Wassim n’a pas été surpris de l’entendre de la bouche de la Commissaire. Toutefois, elle tentait de justifier la technicité autour de l’autoidentification et l’identification raciale dans une ville comme Montréal. Le père de Wassim lui reproche de ne point saisir l’enjeu de cette pratique sur les générations au Québec. Bien que Madame la Commissaire Bochra Manaï ait montré d’un mouvement de tête son accord, elle revient à la charge avec différents scénarios où des personnes noires, voilées, asiatiques, magrébines sont victimes de racisme… « La race c’est le processus de racialisation qui fait qu’il y a des personnes qui vivent des choses inévitables. » Elle disait, Madame la Commissaire qu’elle en a besoin d’identification, de statistiques pour faire son travail et être en mesure de réagir face aux injustices « Parce que si j’ai 50% des personnes qui échouent à des entrevues et que ça donne que ces personnes-là se sont identifiés comme une minorité visible ou comme femme; pour moi c’est une information dont on a besoin socialement pour dire : hummmm, quels sont les réels problèmes dans ces recrutements? » 

Le père de Wassim avait du mal à suivre la commissaire. Il lui parle de Wassim, un Québécois, et elle lui parle de personnes immigrantes. Il lui demande de faire un effort de mettre de côté ses études en urbanismes, en géographie urbaine, en migrations et relations interethniques. Il tente de lui expliquer que ce n’est pas la même chose. Madame Bochra Manaï ne se sentait pas à l’aise. Elle flairait plutôt une attaque contre elle. Les rayons du soleil se retirent de son visage. « Je ne suis pas le président de la commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, » dit-elle. Sa patience se lâchait graduellement: « je vous recommande Monsieur d’aller rencontrer le président de la commission des droits de la personne et je parlerai de votre cas au directeur des services de la police de la ville de Montréal. » 

Elle conduit le père de Wassim à l’ascenseur et en lui serrant la main, elle lui souhaita bonne chance. Les portes se referment aussitôt.

Après cette rencontre, le père de Wassim ne voulait plus rentrer chez-lui. Ses pieds s’enfonçaient dans la neige sous le poids de son corps. En traversant la rue Notre-Dame, il parlait encore le père de Wassim à Madame la commissaire, il l’engueulait comme si elle était son ennemi juré et pourtant, elle n’y est pour rien madame la Commissaire. Rendu à la place Dauversière, quelques touristes déambulant sur la voie publique le regardaient avec méfiance. Il levait les yeux, le père de Wassim un peu plus haut à sa gauche, Il aperçoit la fenêtre du bureau de la Mairesse, elle était fermée. Son visage se transforme en tête d’enterrement. Il baisse relativement le ton et poursuivait sa marche: « elle sait madame, Valérie Plante, comment avancer ses pions en première ligne et attendre ». En le prononçant, il crache en direction de l’hôtel de ville. Il continuait à descendre d’un pas trainant vers le fleuve du Saint-Laurent. Ce dernier soufflait un air humide.  La vision du père de Wassim est embrouillée. Ses paroles ruisselaient fluides sur la surface du fleuve qui se réveille dans ce début de printemps. Il lui parle le père de Wassim : c’est par tes voies que les colons sont venus finalement pour installer la confusion et la division sur cette terre mère de mes enfants. 

À suivre….